L’apport de la réalité virtuelle (VR) apporte des bénéfices indéniables dans nombre de domaines de la médecine.
Dans la rééducation fonctionnelle on peut citer la prise en charge de nombre de pathologies comme les AVC, la maladie de parkinson et troubles de l’équilibre… Il serait trop long de dénombrer ici tous les établissements hospitaliers ayant recours à la VR pour apaiser les patients avant ou pendant une intervention anxiogène ou douloureuse.
En général, la VR est utilisée comme alternative à certains traitements médicamenteux, cependant certains établissements commencent à communiquer sur leur utilisation de la VR en cancérologie. Nous pouvons par exemple citer le centre Oscar Lambret (Lille) qui s’est récemment équipé de 6 dispositifs de VR. Notons que ces dispositifs ne sont pas limités à une utilisation en milieu hospitalier mais se démocratisent dans tout type de structure, y compris libérale.
Son utilisation en cabinet libéral dans les rééducations des suites de cancer semble parfaitement indiquée [1]. Si nous considérons la sénologie et les cancers du sein, les indications de la VR sont omniprésentes. Ce cancer est la maladie oncologique la plus fréquente dans le monde. Il concerne environ 60 000 nouveaux cas par an rien qu’en France. Chaque prise en charge de patiente soignée pour un cancer du sein est spécifique selon le type de traitement et le moment de la prise en charge : pendant ou après une radiothérapie, après une chirurgie curative ou reconstructrice, en post-opératoire immédiat ou à distance…
Alors que certains insisteront sur la composante psychologique lors de ces prises en charge et la nécessité de contact humain, le recours aux techniques instrumentalisées a fait ses preuves dans les traitements des adhérences cicatricielles. Selon une équipe de Montpellier [2], les femmes ayant eu recours à la VR lors de soins anxiogènes ou douloureux sont 93% à redemander ces environnements immersifs pour la suite des soins. On notera la préférence pour les immersions en milieu naturel accompagnées de musique pour aider à s’évader ou à se relaxer. Encore une fois la connaissance de sa patiente et de son état psychologique permettra de proposer cette aide technologique adaptée.
Parmi les symptômes récurrents, on retrouve la douleur et la kinésiophobie. La VR donne la possibilité d’isoler la patiente dans un monde virtuel pouvant être un bord de mer, une forêt : environnements propices à la détente et à la diminution d’angoisses. En isolant la patiente du monde physique le praticien inhibe ses réactions d’anticipation face à une potentielle douleur déclenchée par un stimulus visuel. Ainsi immergée, les manœuvres de libération tissulaires ou de mobilisations passives pourront être abordées différemment.
La VR est un outil technologique proposant des réponses à des problématiques individualisées. C’est un outil supplémentaire proposé au praticien pour la prise en charge de limitations d’amplitudes articulaires. La patiente pourra se voir proposer une rééducation virtuelle avec la réalisation de tâches simples pouvant se rapprocher de tâches de son quotidien, ou des environnements ludiques, qui pourront être paramétrés selon les capacités et les objectifs de la rééducation. Le détournement de l’attention obtenu sera au cœur de la rééducation et aura un effet positif sur une potentielle kinésiophobie.
Cet avantage thérapeutique proposé au praticien simplifie nombres de prises en charge. De plus, le système informatique lié à la VR va quantifier les mouvements réalisés permettant de suivre les progrès tant en amplitude mais également avec des critères difficilement quantifiables en pratique courante comme la vitesse du mouvement réalisé, le temps de réaction, la précision d’un geste ou d’un mouvement.
En résumé la VR est à considérer comme un outil qui doit faciliter la pratique du kinésithérapeute en permettant de placer une patiente dans les meilleures conditions possibles pour accompagner sa rééducation tout en offrant au praticien un outil de mesure simple pour quantifier l’évolution de la prise en charge avec précision.
[1] La réalité virtuelle chez les femmes âgées suivies pour un cancer du sein : intérêts et attentes. Aude Michel, Emmanuelle Brigaud, Florence Cousson-Gélie, JulienVidal, Nathalie Blanc. Geriatr Psychol Neuropsychiatre Vieil 2019 ; 17 (4) :415-22
[2] Dessine-moi une réalité plus belle : la réalité virtuelle vue par lespatientes atteintes d’un cancer du sein. A. Michel1, J. Vidal, E. Brigaud, K.Sokratous et N. Blanc. Psycho-Oncol. Volume 13, p 69-78, Numéro 1, Mars 2019.DOI https://doi.org/10.3166/pson-2019-0087