« Nous sommes ce que nous faisons de manière répétitive, l’excellence n’est donc jamais un acte mais une habitude » Aristote.
La thérapie miroir et la modulation de la perception visuelle de la taille d’un membre douloureux a un effet sur l’intensité de la douleur perçue par le patient. La vue est donc partie prenante de la douleur. Que se passe t’il si l’on réduit la perception visuelle de la taille d’un membre douloureux au point que ce dernier ne soit plus visible par le patient ?
La suppression totale de la visualisation d’un membre dans un environnement virtuel retire l’entrée visuelle du patient sur le positionnement segmentaire dans l’espace. La vue ne pourra plus servir de référence positionnelle dans les réactions d’anticipation à la perception d’une douleur lors d’un mouvement. Le patient devra prioriser ses entrées somesthésiques profondes ou superficielles par rapport à l’entrée visuelle.
La VR est ainsi un outil indispensable pour initier une rééducation gestuelle dans un contexte de kinésiophobie. La réalisation d’une tâche par le patient sans perception visuelle des mouvements d’un membre permet une réduction de la limitation d’amplitude anticipée pour se rapprocher d’une réelle limitation anatomique. Le praticien fait réaliser au patient un geste ou d’un mouvement en VR dans un secteur non douloureux. Lors de sa réalisation il pourra moduler la tâche ou l’environnement en temps réel pour se rapprocher puis dépasser l’amplitude pressentie comme douloureuse.
Ces modifications peuvent se faire de manière perceptible ou non par le patient. Lors de la réalisation d’une tâche à la première personne le patient fait réaliser à son avatar une tâche virtuelle à la même échelle que celui de son geste réel. Ses sensations d’amplitudes sont ainsi superposables à la réalisation gestuelle. Dans un environnement avec une réalisation à la troisième personne le patient interagit avec un objet de manière indirecte. Le praticien peut varier la sensibilité des paramètres nécessitant au patient d’augmenter son amplitude gestuelle sans qu’il puisse percevoir visuellement une modification de son environnement, dissociant la vue afin de promouvoir la perception gestuelle.[1]
Le détournement d’attention par VR a également sa place dans les cas de sidération musculaire. Les variations de paramètres dans l’environnement virtuel recentrent l’attention du patient sur une réalisation gestuelle et non sur une focalisation lésionnelle locale. Ce faisant le praticien pourra rechercher une contraction musculaire par diffusion en chaîne ou par contraction directe.
La réalité virtuelle est un outil de stimulation multi sensorielle qui s’adresse à de nombreux symptômes cliniques et ne cesse d’évoluer pour répondre aux besoins des patients. L’adaptabilité en temps réel des environnements et des tâches à réaliser par le patient est justifié comme un critère incontournable par de nombreuses publications.
[1] Du contrôle de la motricité à l’organisation du geste. J. Paillard et D. Beaubaton Paris, Masson, 1978, 225-260.